Une loi pour mieux protéger le droit à l’image des enfants face aux comportements de certains parents adoptée par l’Assemblée nationale


Dans un rare consensus au sein d’une Assemblée nationale morcelée en dix groupes, les députés ont adopté à l’unanimité, mardi 6 février, une proposition de loi visant à mieux protéger le droit à l’image des enfants face aux comportements de certains parents les exposant sans retenue sur les réseaux sociaux. Le texte a recueilli 195 voix pour et aucune voix contre.

Cette loi, portée par le député du parti Renaissance du Bas-Rhin, Bruno Studer, introduit la notion de « vie privée » de l’enfant dans la définition de l’autorité parentale du Code civil. Et précise que le droit à l’image du mineur est protégé « en commun » par les deux parents, en tenant compte de l’avis de l’enfant.

S’il y a désaccord entre parents, le juge pourra interdire à l’un d’eux « de publier ou diffuser tout contenu relatif à l’enfant sans l’autorisation de l’autre parent ». Dans des cas graves d’atteinte à la dignité d’un enfant, le texte ouvre même la possibilité d’une délégation forcée de l’autorité parentale.

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Un juge pourra ainsi confier l’exercice du droit à l’image de l’enfant à un tiers, un membre de la famille par exemple, voire dans des cas graves procéder à une délégation totale de l’exercice de cette autorité parentale. L’Assemblée a tenu à maintenir cette disposition que le Sénat jugeait inutile.

Ce texte consensuel se veut être une réponse aux dérapages dénoncés par des associations, comme celles des « vlogs » (blogs vidéo) tenus par des parents partageant l’intimité familiale, dont celle de leurs enfants. Députés et sénateurs n’ayant pas réussi à s’accorder sur certains points, c’est l’Assemblée nationale qui a eu le dernier mot, avec l’adoption définitive de sa version du texte, soutenue par le gouvernement.

Préjudice pour l’enfant « à long terme »

Avant le vote solennel, Bruno Studer a tenu à rappeler à la tribune de l’Assemblée que « 50 % des images aujourd’hui échangées sur les forums pédopornographiques sont issues de contenu partagé par les parents ou les enfants sur les réseaux sociaux. (…) Il faut que nous en prenions conscience. » « Le législateur se devait d’intervenir pour tracer des lignes rouges et élaborer un dispositif juridique facilement mobilisable par les juges dans les cas où les parents portent atteinte au droit à l’image de leur enfant », a-t-il défendu. Au-delà des « contenus sexualisés », le député de Renaissance a aussi évoqué les cas d’images « susceptibles de porter préjudice à l’enfant à long terme », à l’origine parfois de cyberharcèlement.

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Dans leur ensemble, les oppositions ont salué ce texte, perçu comme une « première étape ». Le député « insoumis » de Loire-Atlantique, Andy Kerbrat, a notamment estimé que cette loi « vient combler un vide juridique et protéger les plus jeunes dans une partie de leur identité (…), leur image en ligne ». Il a toutefois regretté « l’absence [sur le banc des ministres] d’un secrétaire d’Etat aux droits de l’enfant », alors que la nomination d’une quinzaine de ministres délégués et de secrétaires d’Etat pour compléter le gouvernement est attendue dans les prochaines heures.

« Cette loi permet de souligner que les enfants ne sont pas des sous-citoyens », a expliqué pour sa part la députée écologiste de Paris, Sandrine Rousseau. Dans ses explications de vote, la députée LR de Savoie, Emilie Bonnivard, a, elle, émis des doutes sur « l’impact réel » de cette loi sur « les comportements potentiels des parents et sur la protection réelle de la mise en ligne des enfants. Mais elle a toutefois le mérite d’exister. »

Le Monde avec AFP



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